Une "leçon de mots" pour Libé
Un instant, ce matin, j’ai cru avoir Le Figaro sous les yeux ; mais non, c’était bien Libé et, plus précisément, Véronique Soulé cirant les pompes de Robien, « ardent partisan des mesures de bons sens ». Sauf que dans l’article, il n’y a pas de guillemets. Il s’agit, on l’aura compris, du nouveau rapport de Bentolila préconisant les « leçons de mots » à l’école primaire : 365 mots nouveaux par an, juré, promis. Et pour les années bissextiles, il faudra sans doute une nouvelle circulaire ? Ce qu’on reproche à la journaliste – mais c’est dans la corporation, une lourde tare professionnelle – l’absence totale de regard critique, de distanciation, qui fait considérer la parole de Bentolila comme vérité absolue : ainsi lorsque Bentolila, qui, lui-même, n’a pas mis les pieds dans une école depuis un demi-siècle, affirme que « la lecture ne suffit pas à donner du vocabulaire », on est forcé de le croire sur parole, même si, piteusement, le même reconnaît un peu plus loin qu’ « on manque d’études sur le sujet ». On n’est pas à une contradiction près, l’essentiel étant, comme d’habitude, de démolir « les pédagogues qui privilégient le sens et l’intelligence ». Comme ses collègues, Véronique Soulé ne semble connaître les enseignants qu’à travers les « syndicats enseignants » qui auront – affirme-t-elle – des « réactions mesurées ». Elle n’a sans doute pas lu l’entretien de Pierre Frackowiak au Café pédagogique (13/03/2007), affirmant : « les mots me manquent pour qualifier la gravité de la situation ». Les mots, mais les concepts aussi, manquent aux journalistes pour parler de l’éducation sans dire de bêtises. Allez, une petite leçon de mots pour Libé... http://www.liberation.fr/actualite/societe/240732.FR.php
Rectificatif et mea culpa
J’ai parlé un peu vite : en dernière page de Libé, Véronique Soulé brosse un portrait de Bentolila bien différent de ce que laisse entendre l’article incriminé ci-dessus. J’ai donc parlé trop vite, comme ça m’arrive de temps en temps. Je présente donc mes excuses à Véronique Soulé mais continue de penser beaucoup de mal de Bentolila et de Robien.
http://www.liberation.fr/transversales/portraits/240687.FR.php