L'école est finie...
L’école est finie, les élections sont finies et finie la comédie. On a reçu les profs à l’Elysée, les étudiants à Matignon, les lycéens rue de Grenelle, on a reculé ou fait semblant sur l’Université mais aujourd’hui, maintenant que tout le monde est en vacances, on abat les cartes. Disparition plus ou moins programmée de la carte scolaire, 10 000 profs en moins en 2008 et Darcos, tranquille pour deux mois, qui retrouve les accents de campagne de Sarkozy. Dans un entretien au Figaro Magazine¸il se lance dans la description nostalgique du bon vieux temps où, paysans comme bourgeois, dans un « même consensus social ...respectaient une même vision du savoir scolaire ». C’est bien connu : autrefois, il n’y avait ni grèves, ni violences, ni révoltes, ni révolutions. En ces temps bénis, « la cohérence du savoir ne se discutait pas ». C’était l’époque où les fils de paysans devenaient instituteurs, puis, plus tard, énarques, polytechniciens, normaliens. Tiens, curieux, Darcos ne parle pas des filles, ni des fils de paysans qui restaient paysans ni des fils d’ouvriers qui restaient ouvriers. Bon, me direz-vous, on n’est pas au Figaro Magazine pour argumenter, après tout. Et qui a mis fin à cette belle harmonie, à ce consensus qui « faisait autorité à l’école » ? Bien sûr, c’est mai 68, « l’illusion de mai 68 qui considère la liberté comme un point de départ ». Alors que, pour Darcozy, on n’est libre que si on le mérite : « je crois à l’école de la verticalité, à l’école de la transmission ». Transmettre, oui mais comment ? On n’aura pas l’insolence de poser la question au ministre. Pour Darcos, il y a trop de grèves, trop de militantisme, trop de « débats sociaux dans l’enceinte de l’école ». « L’école – écrit-il – devient une sorte de forum agité par trop de d’activisme et pas assez de citoyenneté authentique ». C’est vrai que lorsque la police rentre dans une école pour y rafler des petits sans-papiers, la « citoyenneté authentique » ne consiste-t-elle pas à aider nos braves policiers au lieu de leur compliquer la tâche ? La conclusion de Darcos est à la mesure de ce qui précède : « il faut rétablir l’éducation civique ». Le ministre de l’Education nationale n’est pas censé savoir que l’éducation civique a toujours fait partie intégrante des programmes scolaires, que depuis 20 ans, elle fait même l’objet d’une épreuve écrite au DNB, où, curieusement, d’ailleurs, pour reprendre la phraséologie du ministre, le civisme se fait par « transmission verticale », comme on vient encore de le voir il y a quelques jours, lors de la dernière édition du brevet (1). Des élèves déclinant sans sourciller les bienfaits de l’armée française, que veut-il de plus Darcos ? Des élèves au garde-à-vous, des élèves en uniforme ? Patience : ces parlementaires qui viennent de faire leur rentrée, on sait de quoi ils sont capables quand tout le monde est en vacances. Leur première préoccupation , dans quelques jours, sera d’abaisser la majorité pénale et d’étendre encore un peu plus le champ de la prison. C’est la première urgence, un signal fort adressé à la société. Ils semblent mus par une phobie profonde, lourde, pour tout ce qui a moins de dix-huit ans et Darcos, dans leur jeu, est sans doute une pièce maîtresse. Du moins jusqu’en septembre, parce qu’après, on ne sait plus trop.
(1) http://journaldecole.canalblog.com/archives/2007/06/25/5420582.html