Violence à l'école : pourquoi donc s'en priver ?
Face au coup de folie d’un collégien à Meyzieu, toujours les mêmes réactions politico-médiatiques affligeantes. Un ado en pleine détresse, à la dérive, mais qui ne trouve personne à qui parler. Certes, il est légitime de poser la question : où sont les médecins scolaires, les psychologues scolaires, les infirmières scolaires, les assistantes sociales scolaires ? Et pourquoi des dizaines de milliers d’adultes ont-ils disparu des établissements ces dernières années ? Mais on ne peut s’empêcher non plus de dénoncer la perversité d’un discours, souvent entendu au sein de l’institution, qui se refuse à considérer un prof comme éducateur, le cantonant dans le rôle de distributeur de connaissances scolaires : on ne parle pas avec le prof, on écoute le prof et l’on se tait. Et devant tout dérapage, parce que les élèves sont des ados, on appelle la police. Avec les résultats que l’on sait. En 2002, un ministre délégué de l’Education nationale parlait de « lever le tabou de la violence scolaire. L’objectif est de faire baisser la violence de moitié en cinq ans ». Le ministre s’appelait...Darcos et les cinq ans sont passés. Il faut dire que nos ministres n’ont pas manqué d’imagination : partenariat renforcé avec la police, caméras de surveillance, règlements intérieurs drastiques. Ah, j’allais oublier la note de vie scolaire qui devait ramener le calme et la sérénité dans les établissements. La prochaine étape sera probablement la disparition de la justice des mineurs par trop laxiste. D’ailleurs, le collégien de Meyzieu vient d’être inculpé pour tentative d’assassinat et à ce titre il n’encourt que 20 ans de prison. Notoirement insuffisant, n’est-ce pas. Ne faudrait-il pas carrément envisager la rétention de sûreté pour tout comportement déviant ? Dati y songe...
Pour Eric Debarbieux, président de l’Observatoire international de la violence à l’école, les solutions sont connues : « A problème complexe, il y a une solution simple et c'est la mauvaise. Penser que l'augmentation de la répression, du lien avec la police, va traiter ce type de problème est un leurre total. Cela ne peut se faire que par une véritable révolution de la formation des personnels d'abord. On sait que climat scolaire et violence à l'école sont très fortement corrélés. On sait qu'un enseignant formé à la gestion du stress, à la gestion du groupe est un enseignant qui a deux fois moins de risques qu'un autre de se faire agresser ou que ses élèves s'agressent entre eux. »
Certes, mais former les enseignants à la gestion des conflits est politiquement moins payant qu’envoyer la police et ouvrir des prisons. Et l’on ne voit pas pourquoi les politiciens se priveraient – en faisant réellement baisser la violence à l’école – d’un thème qui leur apporte tant de voix aux élections. La violence à l’école a encore de beaux jours devant elle.