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Journal d'école
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5 juillet 2008

Saint-Barthélemy

« Une Saint-Barthélemy pour les pédagogues », le titre de la tribune cosignée dans Le Monde (03/07/2008) par Jean-Louis Auduc, Rémi Brissiaud, Sylvain Grandserre, Philippe Meirieu et André Ouzoulias, ne manque pas de pertinence, quoique personnellement,  j’aurais sans doute parlé d’une « Saint-Barthélemy pour l’école ». Les analogies avec l’épisode historique du massacre des protestants sont frappantes : désir d’en découdre, soif de revanche, ambiance de règlement de compte, brutalité de la politique mise en œuvre, tout cela n’est pas sans évoquer, effectivement, cette sinistre nuit d’août 1572. Le plus remarquable reste encore la manière avec laquelle, en quelques mois, voire en quelques semaines, un ministre a pu imposer – au moins sur le papier – des décisions tellement contraires aux problèmes qu’il prétend solutionner : qui peut vraiment croire que les mesures simplistes et caricaturales décidées pour le primaire mais aussi la quasi disparition de la formation professionnelle des maîtres, aideront les élèves les plus en difficulté, alors qu’il y a tout lieu de penser qu’elles les enfonceront encore davantage ? Darcos lui-même y croit-il vraiment ? Que s’est-il passé de nouveau, au cours de cette année, pour que ce qui n’était jusque-là que des ratiocinations passéistes sur l’école d’autrefois se voient légitimées comme réflexion sur l’éducation jusqu’à subvertir tout le reste ? Bien sûr, depuis que l’école existe, il n’a jamais manqué de nostalgiques pleurant sur un ordre éducatif fantasmé et disparu ; régulièrement, à chaque rentrée scolaire, on voit fleurir quantité de pamphlets, se recopiant les uns et les autres, en appelant au retour des « bonnes vieilles méthodes ». Il aurait fallu s’inquiéter, sans doute davantage qu’on l’a fait, de voir, ces récentes années, comment les grands médias, télés, journaux, radios, reprenaient à leur compte les contrevérités, les gros mensonges avancés par la mouvance réactionnaire et contribuer ainsi à la désinformation d’une large partie de l’opinion publique en matière éducative. Copinage entre les auteurs, leurs maisons d’édition et les médias, paresse et ignorance crasse des journalistes ont abouti à un décervelage sidérant qui a autorisé la suite.

La suite s’appelle Sarkozy et le programme éducatif de l’UMP. Car finalement, les mesures imposées par Darcos ces derniers mois ne sont rien d’autre que la transcription du projet électoral du candidat Sarkozy et de son parti : une école qui privilégie la compétition entre les élèves, entre les établissements mais aussi entre les profs d’un même établissement, une école qui fait le choix sans état d’âme de la relégation des plus faibles, une école d’apartheid en quelque sorte. Avec, également, des relents d’ordre moral et une contention renforcée pour les élèves – mais aussi, on commence à s’en rendre compte avec le service minimum, pour les profs. Il est vrai que Darcos peut se réjouir de l’inexistence (ou de l’incohérence) d’une opposition politique sur les questions d’éducation – comme sur beucoup d’autres, d’ailleurs – ce qui ne laisse pas d’inquiéter sur le piteux état de la démocratie en France. Et puisque Darcos a maintes fois réaffirmé qu’il appartenait aux politiques de déterminer la politique éducative, il faut bien comprendre que c’est une école UMP qui rouvrira ses portes à la rentrée. On se permettra quand même de faire observer qu’avec cette prétention hasardeuse du ministre, le système éducatif français s’expose au risque de se voir bouleversé à chaque changement de majorité. Et les élèves, dans tout cela ?

Les lendemains, dans deux mois donc, ne sont pas écrits. Et même si le ministre n’a de cesse de dresser les enseignants les uns contre les autres – par exemple, ceux qui acceptent les heures sup contre ceux qui les refusent – les parents contre les profs, il n’a peut-être pas pris l’exacte mesure des sentiments des uns et des autres. L’instrumentalisation des profs au service d’un homme politique, le sentiment fort chez nombre d’enseignants d’être considérés comme les larbins du pouvoir, la récupération de l’école au service d’une idéologie partisane, tout cela commence à apparaître au grand jour. Même la presse commence peut-être, timidement, certes, à bouger sur l’école. La contestation des dernières semaines a été plutôt bien suivie, en particulier par les journaux qui ne se contentent plus de leurs éternels commentaires sur « les syndicats qui réclament davantage de moyens... », ce qui n’empêchait pas Ouest France, il y a quelques jours de disserter sur les écoliers français « cancres de l’Europe comme le montrent les enquêtes internationales » ( !). Des enquêtes que ce cancre n’avait sans doute jamais lues. On le voit, avec l’école, rien n’est jamais sûr.

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Commentaires
T
Ni 1.0., ni 2.0. : le 16 octobre, nous dirons tous « Non à EDVIGE »<br /> Communiqué du Collectif « Non à EDVIGE »<br /> 7 octobre 2008<br /> <br /> http://nonaedvige.ras.eu.org/
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T
« Un saccage incommensurable »<br /> <br /> <br /> Message d’André OUZOULIAS à Gérard TOUPIOL, président de la FNAME, <br /> Lundi 29 septembre 2008<br /> <br /> <br /> <br /> Mon cher Gérard,<br /> <br /> J'imagine que vous êtes assommés par les dernières nouvelles (suppression de près de la moitié des postes d'enseignants spécialisés en RASED). Luc Ferry avait beau l’avoir annoncé, nous avions beau redouter depuis quelques jours que de telles coupes soient inscrites dès le prochain budget, je reste sans voix face à l'ampleur du fauchage. De plus, il faut maintenant considérer comme probable que le gouvernement ne s’arrêtera pas au milieu du gué et qu’il a déjà décidé de supprimer l'autre moitié des postes de RASED dans le budget 2010.<br /> <br /> C'est un saccage incommensurable : chaque maître spécialisé de RASED représente un trésor de compétences, un appui irremplaçable pour les maîtres et les équipes d'école. Je pense à Ghislaine, à Martine, à Françoise, à Magali… des maîtres E que j'ai côtoyés au cours de ces dernières années et qui m'ont tant appris et j'enrage ! Je pense à tous ceux qui, comme elles, ont acquis une authentique expertise diagnostique et pédagogique sur la grande difficulté scolaire, après des années d'expérience dans le travail auprès d'élèves qui ont des difficultés graves de toutes sortes dans les apprentissages scolaires. Et j'enrage ! Dans les écoles primaires aujourd'hui, personne ou presque ne sait vraiment faire ce travail.<br /> <br /> Si on considère que chacun des 7 000 maîtres E et G de RASED sauve chaque année du désastre, ne serait-ce que 10 gamins de cycle 2, c'est 70 000 enfants qui, au lieu d'être soustraits à l'échec scolaire, seront bientôt pratiquement abandonnés à leur sort. Malgré toute la bonne volonté des enseignants (et elle est grande !), ce n'est évidemment pas deux fois 50 minutes de « soutien » par semaine qui peuvent remplacer une prise en charge spécialisée E ou G, éventuellement au sein même de la classe. Comment croire que le gouvernement souhaite vraiment diviser par 3 le nombre d'élèves en grande difficulté face à l'écrit, s'il raye ainsi d'un trait de plume, sans aucun scrupule, un dispositif dont bénéficient les élèves les plus en difficulté ? <br /> <br /> Et quelle économie fera-t-on finalement ainsi dans les divers budgets de l'État, si demain, ces 70 000 élèves se retrouvent aux limites de l'analphabétisme ? Combien de postes faudra-t-il créer en SEGPA dans quelques années ? Combien de classes-relais ? Et dans vingt ans, combien de pauvres, que l'on qualifiera d’« inemployables » et pour lesquels on débattra pour savoir s'il vaut mieux un RMI, un RSA ou une quelconque autre allocation-pauvreté ? Et dans trente ans, combien d'enfants de ces personnes qui, à leur tour… ?<br /> <br /> Victor Hugo disait : « Ouvrez des écoles, fermez des prisons ». N'est-il pas curieux de constater que, dans le projet de budget 2009, on supprime des milliers de postes d’enseignants, tandis que le nombre de postes de gardiens de prisons est l’un des rares à augmenter fortement ?<br /> <br /> Xavier Darcos pense peut-être que, du fait que les effectifs moyens par classe ne monteront pas significativement et qu'il offre 2 h de « soutien » aux « élèves-en-difficulté », les parents ne s’apercevront de rien et ne diront rien. Mais pour cette fois, je crois qu'il se trompe. Les parents peuvent comprendre qu'il y a là une escroquerie. Si on leur explique qu'en supprimant les psy, les E et les G des RASED, le ministère prend, dans le domaine de l'éducation, une mesure qui reviendrait, dans celui de la santé, à supprimer les spécialistes (ophtalmo, ORL, gastro, etc.) tout en proclamant que les généralistes sauront répondre aux besoins des patients, ils ne laisseront pas faire. <br /> <br /> Les parents des élèves en situation de handicap doivent aussi savoir que la fin des RASED sera une entrave à l’intégration dans bien des écoles, là où des élèves sont intégrés dans des classes ordinaires et où ils bénéficiaient de l’aide d’un maître E ou G au titre de la difficulté scolaire. Ils ne laisseront pas faire.<br /> <br /> Le ministère dit : les maîtres spécialisés « pourront, au sein des écoles et dans le cadre de la nouvelle organisation de la semaine scolaire, traiter au mieux et en continu la difficulté scolaire ». Il ajoute qu’« ils garderont leur indemnité spéciale ». Je crains qu’il veuille rouvrir 3 000 classes d’adaptation à l’année, où l'on mettra les élèves les plus en difficulté, encadrés par les maîtres E sédentarisés. Même chose l’an prochain pour 3 000 autres classes. Pour l’instant, il y a des obstacles juridiques à une telle réforme. Mais aussitôt que la loi sur les EPEP sera adoptée (elle sera débattue en janvier), cela pourrait devenir licite, la classe d’adaptation d’un EPEP pouvant vraisemblablement accueillir des élèves qui relèvent actuellement de plusieurs secteurs scolaires. <br /> <br /> Un tel projet n’aurait d’autre avantage que de faire des économies à court terme. Pour le reste, il serait anachronique et paradoxal : au moment où l’école fait un effort considérable pour intégrer les enfants en situations de handicap, nous serions le seul pays d’Europe à créer des dispositifs pour externaliser le traitement de la difficulté. Y aura-t-il quelqu’un, au ministère, pour démentir cette tentation d’un retour déguisé aux classes de perfectionnement des années 1970 ?<br /> <br /> Un observateur impartial aurait quand même peine à croire que le gouvernement a pris cette décision uniquement pour des raisons budgétaires. N’y a-t-il pas d’autres raisons ? Le ministère a-t-il fait réaliser une évaluation du travail des RASED ? Les personnels des écoles, spécialisés ou non, ont besoin de le savoir. Les parents d’élèves et les citoyens doivent également être éclairés sur ce point, car il s’agit à la fois de l’avenir de dizaines de milliers d’enfants et de la gestion des deniers publics.<br /> <br /> Quoi qu’il en soit, on se pose inévitablement beaucoup d’autres questions : À quoi ressemble ce pilotage de l’institution scolaire, quand on efface ainsi quarante ans d’histoire de l’adaptation scolaire sans aucun débat préalable ? Au moins, le ministre précédent, pour réformer tel ou tel volet de la politique scolaire, commençait-il par demander un rapport à des IG ou à un universitaire ou par réunir des spécialistes lors d’une journée d’études… Que dire de cette façon de bouleverser ainsi l’école, de chambouler l’approche de la grande difficulté scolaire sans consulter ni les personnels, ni l’Inspection Générale, ni les spécialistes, ni même les instances officielles comme le Haut Conseil à l’Éducation ? Quelles autres professions accepteraient d’être ainsi méprisées ? Cette façon d’exiger des personnels qu’ils obéissent sans comprendre devrait-elle être considérée comme le modèle éducatif de ce ministère ? <br /> <br /> Nous avons quelques mois pour susciter un mouvement ample et uni parmi les enseignants et les parents : il s’agit de préserver l’un des moyens les plus efficaces que nous ayons pour travailler à la réussite de tous les enfants. La FNAME peut compter sur mon soutien… et sur mon aide.<br /> <br /> Amicalement et solidairement.<br /> Bien à toi,<br /> <br /> <br /> André OUZOULIAS<br /> professeur à l'IUFM de Versailles-UCP (Université de Cergy-Pontoise),<br /> Département PEPSSE (Philosophie, épistémologie, psychologie, sociologie et sciences de l'éducation)
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T
http://nonaedvige.ras.eu.org/<br /> <br /> Joseph Raymond McCarthy, né le 14 novembre 1908 dans le Wisconsin, décédé le 2 mai 1957 à Bethesda dans le Maryland, était un homme politique des États-Unis d’Amérique, affilié à l'origine au Parti Démocrate, puis au Parti républicain. McCarthy a occupé le poste de sénateur de l'État du Wisconsin de 1947 à 1957.<br /> <br /> En dix ans de carrière au Sénat des États-Unis d'Amérique, McCarthy et son équipe sont devenus célèbres pour leurs diatribes contre le gouvernement fédéral des États-Unis, et pour leur campagne contre tous ceux qu'ils soupçonnaient d'être ou de sympathiser avec les communistes. Cette période comprise entre 1950 et 1956, connue sous le nom de « Terreur Rouge » (Red Scare), a aussi pris le nom de maccarthisme.<br /> <br /> Pendant cette période, tous ceux qui étaient soupçonnés de sympathies communistes devinrent l'objet d'enquêtes, collectivement nommées la « Chasse aux Sorcières ». Des gens des médias, du cinéma, du gouvernement et de l'armée furent accusés d'être des espions à la solde des Soviétiques. Bien que les enquêtes de McCarthy n'aient jamais conduit à des inculpations pour espionnage, des informations récemment rendues publiques indiquent que certaines des personnes qu'il soupçonnait auraient effectivement pu être coupables.<br /> <br /> Le terme de « maccarthisme » est depuis devenu synonyme d'activités gouvernementales visant à réduire l'expression d'opinions politiques ou sociales gauchisantes, en limitant les droits civils sous prétexte de sécurité nationale.
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T
"Théo, Victore, Mélex, vous me gonflez ! J'ai été 7 ans formatrice en IUFM".<br /> <br /> Et qui donc avait exigé de toi un tel sacrifice ?
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T
Dès lors, je me demande bien en quoi consistera le second effet Darcos, mais je retiens ma respiration, je demeure... en apnée !
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