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Journal d'école
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15 octobre 2008

En finir avec la Marseillaise

N’en déplaise à Le Pen qui voit dans les sifflets contre la Marseillaise hier au Stade de France, « un échec de l’intégration des masses étrangères », on ne peut nier le lourd contentieux que cet hymne national traîne derrière lui. Car s’il faut s’intégrer, pour reprendre la terminologie du Front national, pourquoi faudrait-il que ce soit dans le cadre arbitraire de la « nation », que personne n’a jamais été en mesure de définir, sinon lorsqu’il s’agit de dresser des frontières artificielles entre les hommes et surtout, s’intégrer par l’adhésion à une morale aussi brutale et ridicule que celle véhiculée par la Marseillaise ?

« Qu’un sang impur abreuve nos sillons (...). Quoi ! Ces cohortes étrangères feraient la loi dans nos foyers ! (...) Tout est soldat pour vous combattre. S’ils tombent, nos jeunes héros, la terre en produit de nouveaux (...). » Il faut en convenir : par son verbe entre saumâtre et mortifère, l’ « intégration » à la française aurait donc le goût du sang. Malgré les clameurs et l’indignation quasi générale en provenance de la classe politique de la gauche à l’extrême-droite, on est forcé de reconnaître que la Marseillaise n’a jamais fait l’unanimité au point que seule la menace de sanction peut dissuader d’en faire la critique : il faut rappeler qu’en janvier 2003, dans le cadre de la loi dite « de sécurité intérieure », le législateur créait l’inénarrable délit d’ « outrage à symboles nationaux » passible de 6500 euros d’amende et de six mois de prison. Ce faisant, les parlementaires d’une république qui, à ce qu’il paraît, fait de la laïcité une de ses valeurs fondatrices, donnaient une nouvelle jeunesse au délit de blasphème, qui, sous l’Ancien Régime, autorisait à trancher la langue pour toute parole jugée inconvenante ou blessante contre la religion catholique. Dans la foulée, en 2005, suite à un amendement déposé par un député proche de l’extrême-droite, Jérôme Rivière, l’apprentissage de la Marseillaise se trouvait renforcé dans les écoles...quoiqu’en fait il y ait été réintroduit vingt ans plus tôt par Chevènement, alors ministre de l’Education nationale. Obligation d’une efficacité plutôt douteuse puisque, dans les derniers programmes du primaire (avril 2008), Darcos n’a pu s’empêcher d’en rajouter une couche, suggérant que les élèves se mettent debout pour la Marseillaise, en attendant, sans doute qu’on les fasse mettre à genoux sur un prie-Dieu.

C’est d’ailleurs dans les écoles que la pratique de ce qu’on peut assimiler à un cantique, inaccessible à la critique et à la raison, éveille les plus fortes réticences. La Marseillaise, par la violence et le fanatisme de ses paroles, est en parfaite opposition avec les valeurs de tolérance, de non-violence, de respect des autres, d’ esprit critique, valeurs qui demeurent les fondements de l’éducation.

Est-il acceptable que, dans un monde où la guerre fait des ravages, chez nous, dans nos écoles, la guerre soit magnifiée par de tout jeunes enfants à qui les programmes scolaires feraient chanter « Aux armes, citoyens », oubliant ainsi les milliers d’enfants qui meurent à cause des armes ? A une époque où le racisme, la xénophobie, le rejet de l’autre constituent une lourde menace pour la vie en société, l’intégration d’un jeune ne pourrait donc se réaliser que dans une entité nationale qui s’érige sur la distinction entre sang pur et « sang impur » et qui exigerait de ses enfants qu’ils apprennent à verser le « sang impur » ? Le rôle de l’école est d’ouvrir sur le monde, non de dresser des barrières artificielles entre les individus. Il est parfaitement scandaleux et contraire, d’ailleurs, à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, fondatrice de la république, que, sur un sujet qui touche au libre-arbitre, à la morale personnelle, on puisse imposer à chacun par la force, de façon règlementaire, une croyance partisane, une sorte de  dogme révélé qu’on ne soumet jamais à la discussion, bafouant ainsi la plus élémentaire des libertés de conscience.

Les sifflets contre la Marseillaise qui, hier, ont joyeusement rempli le Stade de France ont provoqué des réactions enflammées, dont beaucoup à forte connotation anti-maghrébine. Ce n’est pas un hasard. On se contentera simplement de faire observer qu’il n’est pas nécessaire d’être maghrébin pour appeler de ses vœux la disparition d’un hymne à la fois ringard et dangereux, ferment des guerres et des haines nationales et qui reste aujourd’hui encore le meilleur moyen à la disposition d’un gouvernement pour se faire obéir sans réfléchir.

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Commentaires
L
"Vous n'êtes de nulle part et vous n'assumez aucun héritage..." Dans le fil de la discussion, j'ai cru montrer, que l'héritage, ce dont on hérite donc, n'avait rien de national. On ne voit d'ailleurs pas pourquoi il en serait autrement. Quant à savoir d'où l'on vient, ma seule certitude est que je viens du ventre de ma mère. Suis-je le seul dans ce cas ? <br /> Pour ce qui est de l'"internationalisme prolétarien", oon sait très bien qu'il a très vite tourné au nationalisme pur jus.
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C
"Oui, juste une donnée. Il faut dire que j'auraiS pu aussi bien être allemande, russe ou espagnole, au choix, vu mes origines plus que diverses..."<br /> <br /> Pourquoi toutes ces précisions? Si être français n'a aucun sens, allemand, italien ou guatémaltèque non plus. Donc vous n'êtes de nulle part et vous n'assumez aucun héritage: inutile de mentionner vos origines.<br /> <br /> "Je préfère mille fois ça que d'être à la limite de la vénération d'une entité. On sait ce que ce genre de trucs à pu donner par le passé."<br /> <br /> C'est sûr que "les prolétaires n'ont pas de patrie", ça a été aussi une grande idée. Jusqu'à nouvel ordre l'internationalisme communiste est recordman en matière de carnages.<br /> <br /> "Je ne paye pas mes impôts par patriotisme, vous oui? Vous signez votre chèque à quel ordre? "La France"?"<br /> <br /> l'Etat français n'est pas la France qui n'est pas non plus simplement un pays.
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T
vous payez vos impots à l'Etat, or il se trouve que c'est un Etat-Nation. Peut etre qu'un jour on paiera nos impots au trésor public de la commission européenne fiscale, pour l'instant c'est ca. Effectivement vous pouvez aussi vivre en Irlande ou en Suisse pour en payer moins.
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S
Oui, juste une donnée. Il faut dire que j'aurai pu aussi bien être allemande, russe ou espagnole, au choix, vu mes origines plus que diverses...<br /> <br /> Je préfère mille fois ça que d'être à la limite de la vénération d'une entité. On sait ce que ce genre de trucs à pu donner par le passé. <br /> <br /> A Tartempion: lol. J'adore vos réponses, toujours à coté... <br /> <br /> A quoi ça sert d'être français: <br /> ---> quand on est français, on paye des impôts ---> Les impôts payent les fonctionnaires, donc les profs. <br /> ---> Ça sert à payer les profs...<br /> <br /> Je ne paye pas mes impôts par patriotisme, vous oui? Vous signez votre chèque à quel ordre? "La France"?
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R
Oui, mais vous savez bien que les politiques n'appliquent et ne promulguent que les lois qui les arrange...
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