"Français d'abord", est-ce si sûr ?
Le sondage TNS Sofres pour la Croix (17-18 novembre 2009) nuance sérieusement, voire contredit l’idée selon laquelle l’identité nationale irait de soi, ne souffrirait aucune réserve. Si 68% des sondés affirment se sentir avant tout Français, ils ne sont plus que 38% à faire le même choix lorsque la question leur offre plusieurs réponses possibles. Dans ce cas, 21% se sentent d’abord habitants de leur ville, 14% habitants de leur quartier et même 11% citoyens du monde. Chiffres, qui, dans le contexte actuel, ne manquent pas d’intérêt, démentant l’unanimisme habituellement opposé aux détracteurs de l’idée nationale.
« De manière générale, qu’est-ce qui, selon vous, rapproche le plus les gens entre eux ? », à cette question pertinente, parce que constitutive de l’identité collective, seuls 10% répondent que c’est la nationalité contre 41% le milieu social. Un sondage qui renvoie dans les cordes la désormais célèbre circulaire Besson aux préfets et ses questions exprimant comme des évidences ce qui n’est que le choix personnel du ministre. « Pourquoi nous sentons-nous proches des autres Français même sans les connaître ? » demande Besson. Alors que la question est tournée de telle sorte qu’on ne puisse rien lui opposer, 41% montrent qu’ils ne sont pas dupes : privilégier l’identité nationale à l’identité sociale permet de donner le change, de tenter d’étouffer le sentiment d’injustice et les contestations qui en résultent. Le débat Besson est un moyen comme un autre (avec la grippe A...) de passer sous silence les chiffres toujours plus mauvais du chômage ou des déficits sociaux.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’attribuer à cette enquête plus de valeur que n’en méritent habituellement les sondages mais il faut bien considérer que, de leur côté, les zélateurs de l’identité nationale n’ont le plus souvent pas grand chose d’autre à proposer qu’un argumentaire qui relève de l'irrationnel ou de la foi révélée plus que de la raison.