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Journal d'école
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2 mai 2010

Ciotti et Morano devraient lire Grosperrin

« 400 000 enfants qui ne vont pas à l’école », c’est à partir d’un chiffre hautement fantaisiste repris par Nadine Morano et la plupart des médias que le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti  propose de sanctionner lourdement les parents d’élèves absentéistes. Un minimum de sérieux et de recherche des sources montrent pourtant une réalité très différente. Les sources, comme très souvent en la matière, sont à chercher du côté des publications de l’Education nationale. Ainsi, selon la Note d’information 10.08  d’avril 2010, le taux moyen d’élèves absentéistes, dans le second degré, qui se situait entre 2% et 6% selon les mois de l’année pour la période 2003-2007, varie entre 3% et 10% en 2007-2008, soit, précise la note, une légère augmentation après quatre années de stabilité. En primaire, le phénomène est à peine mesurable : 0,01% pour le public, moins pour le privé. Il faut aussi préciser que, selon les critères de l’Education nationale, un élève est considéré comme absentéiste à partir de quatre demi-journées par mois d’absences non régularisées, même s’il est présent dans l’établissement tout le reste du temps. On est donc très loin des « 400 000 enfants qui ne vont pas à l’école » claironnés par la secrétaire d’Etat à la famille pour affoler l’opinion publique.

 

On ne peut s’empêcher de rapprocher l’initiative bâclée et populiste du député des Alpes-Maritimes d’un  travail autrement plus conséquent livré il y a quelques semaines par plusieurs de ses collègues, pourtant majoritairement UMP, dans le cadre d’une mission parlementaire sur l’application du socle commun de compétences et de connaissances au collège. Pendant plusieurs semaines, sous la conduite de Jacques Grosperrin, la mission a auditionné des enseignants, des chefs d’établissement, des parents, des membres de l’administration, des historiens, des chercheurs, des pédagogues, des responsables associatifs, en un mot, ils se sont attelés à une besogne qu’il est légitime d’attendre de tout parlementaire digne de ce nom. Le rapport qu’ils ont fourni, qui n’a probablement pas touché le grand public, est pourtant d’une autre tenue que les gesticulations du député Ciotti. Evoquant l’absentéisme, loin de stigmatiser les élèves ou d’accuser les familles défaillantes et négligentes, le rapport évoque le collège comme « lieu de souffrance et d’exclusion » (p.20) ; il rappelle une enquête bien connue de l’OCDE qui place la France au 22e rang sur 25 dans le domaine de la qualité de vie à l’école (p.51) : « notre Ecole – écrit le rapporteur – souffre d’un trop plein de manque de confiance et de stress des élèves ». Des initiatives locales visant à l’information des parents, leur implication dans la vie de l’établissement, réussissent à faire baisser sensiblement l’absentéisme, bien plus sûrement que des sanctions financières touchant les familles les plus modestes. Plutôt qu’à se défausser sur les familles, l’absentéisme doit conduire l’école à se remettre en cause, en tant que signe de l’échec scolaire, ce que confirme, d’ailleurs, la situation des lycées professionnels, là où le phénomène est statistiquement le plus préoccupant : ce n’est injurier personne, surtout pas les lycées professionnels, que d’affirmer que nombre d’élèves qui y arrivent traînent déjà derrière eux de longues années de souffrance scolaire que l’absentéisme est un moyen de faire oublier au moins momentanément. La note d’information mentionnée plus haut évoque d’ailleurs une autre responsabilité de l’Education nationale, induite cette fois-ci par les failles du système de remplacement : « en 2007-2008, pour l’ensemble des établissements, la part d’enseignement perdu en raisons d’heures d’enseignement non assurées s’établit à 5,5% » (p.4), un phénomène qui s’aggrave depuis deux ans suite à la politique de non remplacement des enseignants voulue par l’Education nationale… et approuvée par Eric Ciotti.

 

On doute qu’avant de déposer sa proposition de loi visant à supprimer les allocations familiales, ce dernier se soit astreint à prendre connaissance du rapport Grosperrin. La réussite scolaire du plus grand nombre n’est sans doute pas sa préoccupation. Plus vraisemblablement, élu d’une région où le vote d’extrême-droite fait lourdement sentir son poids sur la vie politique, son initiative doit être mesurée à l’aune  du bénéfice qu’il en retirera au sein de cet électorat.

 

 

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Commentaires
M
"Je rappelle que nous, écoles primaires, n'avons pas le droit de garder un élève indéfiniment, jusqu'à ce qu'il sache lire ou connaisse ses tables de multiplication par exemple." <br /> 1) comme si vous y étiez idéologiquement favorable (i.e. les garder indéfiniment)<br /> 2) comme si, dans le secondaire, on avait le droit de le faire...<br /> 3) quel aveu, finalement.. Comment: des élèves sortent du primaire sans savoir lire? Nooon?
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T
Pourquoi pas ? Vous avez raison, en effet. <br /> <br /> Tel élève peut très bien réussir ses toutes premières années d'école primaire et cata, être plus ou moins vite dégoûté, démobilisé, ou considérer que ses efforts et ses réussites ne sont pas ou mal jugés. <br /> <br /> Les enseignants des classes élémentaires peuvent bien être désignés comme responsable de ce fait, je suis entièrement d'accord avec vous, certain(e)s abruti(e)s n'ont rien à apporter aux gamins et pour certains matons parmi eux, bien au contraire !<br /> <br /> Cela n'exonère pas pour autant les responsables politiques à l'origine de la dégradation des conditions de scolarité des élèves.<br /> <br /> Cela n'exonère pas non plus les collègues de Sixième d'accueillir leurs élèves tels qu'ils sont pour les faire progresser. <br /> <br /> Je rappelle que nous, écoles primaires, n'avons pas le droit de garder un élève indéfiniment, jusqu'à ce qu'il sache lire ou connaisse ses tables de multiplication par exemple. <br /> <br /> Je signale à ce sujet à nos aînés et aux nostalgiques que le certificat d'études primaires n'existe plus !<br /> <br /> Donc, quel est votre choix au secondaire ? <br /> Maugréer contre les collègues du primaire qui "n'ont pas fait leur boulot", ou bien aider vos élèves à progresser ?<br /> <br /> L'immense majorité de nos collègues de collège a depuis bien longtemps compris et fait ses choix ! <br /> (Ce qui d'ailleurs, ne les empêche pas de maugréer, ce qui est bien normal !).<br /> <br /> Bien cordialement,<br /> <br /> Théo
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M
"Bande de rigolos ! Tant que vous, profs du secondaire, considèrerez que nous, profs du primaire, devrions répondre à certaines de vos exigences, rien ne sera possible !<br /> Attachez-vous plutôt comme nous à accueillir vos élèves tels qu'ils vous sont confiés pour les faire progresser, en oubliant 5 minutes vos capes et vos agrégations !"<br /> <br /> Dans le genre procès d'intention et imprécation, on ne fait guère mieux. Comment reprocher à certains parents et élèves leur détestation des savoirs et de leurs représentants quand cette détestation est d'évidence encore plus forte chez certains enseignants?
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T
Encore une fois, renseignements pris, Grosperrin concerne le secondaire.<br /> Et comme le secondaire ne regarde jamais vers le primaire, mais se sent plutôt en position d'exiger quoi ou caisse, de quel droit ? ... !<br /> <br /> Bande de rigolos ! Tant que vous, profs du secondaire, considèrerez que nous, profs du primaire, devrions répondre à certaines de vos exigences, rien ne sera possible !<br /> <br /> Attachez-vous plutôt comme nous à accueillir vos élèves tels qu'ils vous sont confiés pour les faire progresser, en oubliant 5 minutes vos capes et vos agregations !<br /> <br /> Bien cordialement,<br /> <br /> Théo
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T
Bon, je me calme : c'est qui, finalement, ce Grosperrin" ?<br /> <br /> Un mec qui a fait son boulot de parlementaire sérieusement et que l'on a pas entendu ?<br /> Mais on s'en fout, de ce gratte-papier !<br /> <br /> Passé aux oubliettes le Grosperrin !<br /> <br /> On s'en fout, on suit plutôt Koh lanta et Fort Boyard à la télé que c'est des gens beaux et forts, et puis Nouvelle Star Académie que le jury c'est des gens compétents qui savent juger si c'est bon ou pas et qui c'est qui fera une carrière et aura le droit de faire sa vie.<br /> <br /> Théo
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