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Journal d'école
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30 septembre 2012

Programmes de lycée, harkis aux programmes : l'histoire sous influence

On croyait la chose entendue : après les oukases, les coups de force, les annonces à répétition de l’époque Sarkozy, le dialogue, le respect des partenaires devaient reprendre leurs droits en matière éducative, notamment dans le cadre de la consultation nationale en vue d’une hypothétique « refondation » de l’école. De bonnes intentions qui n’auront guère franchi le mois de la rentrée. Immanquablement, c’est l’enseignement de l’histoire qui semble faire les frais de la précipitation gouvernementale.

Après la décision, inspirée par le ciel davantage que par les instances habituelles de concertation, d’instaurer dans le cursus scolaire une inquiétante et improbable nouvelle discipline à part entière, la morale laïque – une corvée dont il ne fait guère de doute qu’elle échoira aux enseignants d’histoire-géographie – le ministre a fait part de son intention d’alléger les programmes d’histoire de la classe de première en lycée et, conjointement, de rétablir l’épreuve d’histoire au bac de terminale S, supprimée par Luc Chatel dans le cadre de la réforme du lycée. Une suppression qui, de fait, avait eu pour effet de charger les programmes de première au point de les rendre difficilement praticables.

Indépendamment du fond, c’est la manière peu usitée dont la chose s’est faite qui interpelle. D’abord parce que c’est par le site d’un syndicat que la nouvelle de l’allègement des programmes a été annoncé, concrétisation d’un lobbying intense mené par une partie de la profession, mais sans doute pas par toute, et qui court-circuite la consultation officielle en cours par ailleurs, mise devant le fait accompli. Le prétexte invoqué – l’urgence – ne tient pas la route, car si urgence il y a, elle concerne non seulement l’histoire en lycée, mais aussi toutes les disciplines – les profs de SES (sciences économiques et sociales) n’ont d’ailleurs pas tardé à donner de la voix – mais aussi, pour en rester à l’enseignement de l’histoire, aux programmes de  collège, tout aussi indigestes. C’est une tradition de l’école française : « boucler le programme » semble la fin ultime assignée à l’histoire scolaire.

Surtout, pour en rester dans le domaine des soins d’urgence, s’il fallait s’attaquer au pire en matière de programmes d’histoire, c’était d’abord par ceux de l’école primaire, imposés par Darcos en 2008,  qu’il fallait commencer, élaborés en images d’Epinal autour des « grands héros de l’histoire de France », programmes porteurs de valeurs passéistes bien incapables de répondre aux interrogations des enfants d’aujourd’hui. La suppression de l’histoire en terminale S aurait donc été jugée plus intolérable que l’histoire lourde et ringarde dans laquelle sont trimbalés les enfants de l’école élémentaire ? La première marche dans la construction d’une personne compterait moins que la certification finalement assez formelle d’une scolarité.

Comme si tout cela ne suffisait pas, l’enseignement de l’histoire a de nouveau été interpellé mardi 25 septembre dans un message adressé aux harkis par le président de la République à l’occasion de la journée d’hommage national rendu à ces derniers, avec une annonce à la tonalité très sarkozyenne : Hollande a en effet assuré qu’une place plus grande serait faite à l’histoire des harkis « dans les programmes scolaires, les travaux de recherche ».  Quelque chose qui rappelle étrangement la loi de 2005 qui sommait les programmes scolaires de reconnaître « le rôle positif de la présence française outre-mer et notamment en Afrique du Nord », une prétention législative que la vigueur des réactions avait rendue caduque.

On avait pourtant cru comprendre que, dans le cadre du débat en cours sur la refondation de l’école, l’élaboration des programmes se verrait confiée à une commission compétente (plus ou moins) indépendante : l’histoire, elle, reste sous surveillance.

 

B. Girard

 

Depuis deux semaines, je tiens sur Rue89 le blog « Journal d’un prof d’histoire », plus spécialement consacré à l’enseignement de l’histoire, un sujet qui permet quand même de ratisser large… Les fidèles lecteurs de « Journal d’école » - peu nombreux mais ils existent et je les en remercie – continueront à trouver ici même les articles publiés sur Rue89.

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