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Journal d'école
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8 janvier 2014

On n'enseigne plus la Shoah à l'école ? Quand l' UMP se refait une virginité

Si Dieudonné n’existait pas, il faudrait l’inventer. A droite comme à gauche, les mouvements du menton, les condamnations véhémentes se multiplient qui permettent à chacun, par une posture anti raciste savamment composée,  à travers de doctes leçons de morale, de se refaire à bon compte une virginité dans un domaine où, pourtant, la chose ne va pas de soi.  Le dernier en date, Bruno Le Maire (sur France Inter),  retient tout spécialement l’attention : pour lui, c’est l’Ecole qui porte la responsabilité des délires antisémites de Dieudonné et plus généralement de la banalisation du racisme, car « en matière d’éducation – avance-t-il sentencieusement – nous avons failli. » Des propos qui, dans la bouche d’un haut responsable UMP, ancien ministre de Sarkozy, ne manquent pas de piquant.

Il paraît donc que « dans certaines écoles de la République, on ne peut pas enseigner la Shoah, on ne peut pas enseigner ce qu’est le racisme ».  Comme, sur ce point, Bruno Le Maire ne se donne pas la peine de citer ses sources, il faudrait donc le croire sur parole ou, peut-être, remonter à une vague enquête lancée il y a plus de dix ans par la très bruyante et pourtant peu représentative Association des Professeurs d’Histoire-Géographie (APHG) sur les difficultés supposées rencontrées dans les classes autour de l’enseignement de questions dites « sensibles », une enquête qui, malgré une méthodologie rudimentaire et des conclusions fantaisistes, n’en continue pas moins, dix ans plus tard, à être brandie dans certains milieux, avec un écho médiatique jamais démenti, comme la preuve irréfutable qu’aujourd’hui, dans une France islamisée, l’enseignement de la Shoah à l’école serait devenu impossible. Dans cette optique, le sort des Juifs importe à vrai dire moins que la dénonciation des Musulmans.

Face aux élucubrations de Bruno Le Maire - en attendant qu’il veuille bien fournir les preuves de ce qu’il avance – la meilleure réponse se trouve encore dans les programmes officiels d’histoire et de géographie (école primaire et collège, lycée) qui font une large place au génocide des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, sujet sur lequel les générations actuelles, élèves et enseignants n’ont guère de leçon à recevoir de leurs pères, longtemps timorés sur le sujet. Car plutôt que de se lamenter sur le triste destin de « l’école de la République » qui n’assumerait plus son rôle dans la transmission du passé, on serait bien inspiré de se souvenir qu’il lui a fallu du temps, à la République, toute empêtrée par le souvenir de la collaboration, pour accepter que dans ses écoles, la Shoah soit enseignée pour ce qu’elle fut vraiment, plus souvent, d’ailleurs, sous la pression des historiens que de sa propre initiative.

La tirade fumeuse de Bruno Le Maire sur l’enseignement de l’histoire est d’autant moins recevable qu’elle vient d’un politicien qui, jusqu’à présent, s’est accommodé sans état d’âme apparent, de la brutale résurgence dans le débat public de discours et d’attitudes ouvertement racistes et xénophobes, dont le spectacle de Dieudonné n’est qu’un épiphénomène. A cette évolution dont nul ne sait où elle peut mener, on peut sans risque d’erreur donner une date de naissance et nommer l’initiateur : le 30 juillet 2010, à Grenoble, par un discours d’une rare violence qui restera dans les annales, un président de la république régulièrement élu déclarait ouverte la chasse aux Roms, entraînant derrière lui une large partie de l’opinion, déjà travaillée dans ses mauvais démons par un calamiteux débat sur l’identité nationale. Indéniablement, cette période a libéré la parole, légitimé les peurs, banalisé le racisme. Le tout avec l’approbation jamais démentie de Bruno Le Maire, alors ministre du président en question et haut dignitaire du parti au pouvoir mais à qui il faut trois bonnes années supplémentaires pour faire semblant de s’inquiéter d’un dérapage moral et intellectuel qu’en tant que responsable gouvernemental il avait pourtant cautionné.

Que l’école ne soit pas, épisodiquement et ponctuellement, à l’abri de tensions racistes (ou raciales) est une chose possible – preuve au passage que l’enseignement de l’histoire ou les leçons de morale civique si chères aux politiciens ne font pas grand chose à l’affaire ; il en sera ainsi tant que le système éducatif, malgré des dénégations outragées qui ne font plus guère illusion, continuera à sélectionner les élèves sur une base principalement ethnique. Mais à entendre Bruno Le Maire -  et Valls avec lui et d’autres encore auto-promus champions de l’antiracisme - ce genre de préoccupations n’est manifestement pas de celles qui agitent pour le moment la classe politique.

Preuve supplémentaire, s’il en était besoin de l’extrême confusion qui règne aujourd’hui dans la sphère médiatico-politique, la garde-à-vue au commissariat de Montgeron (Essonne) de deux lycéens, pour la photo d’une quenelle à l’intérieur de leur établissement, une enseignante ayant porté plainte pour apologie de crime contre l’humanité. Pas moins. Une qualification, qui, si elle est retenue, est passible de 5 ans de prison et de 45 000 euros d’amende. Pour en arriver à une disproportion aussi extravagante entre les faits poursuivis et la sanction encourue, il faut croire que l’enseignante n’a pas compris grand-chose à la réalité de la Shoah ou, peut-être encore, que la France a un réel problème avec cet épisode de l’histoire, comme si ce pays avait quelque chose à se faire pardonner…

 

B. Girard

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Commentaires
T
Mais arrêtez un peu avec vos leçons de morale vous n'avez pas le monopole de l'antiracisme. 30% des juifs seulement fréquentent l'école publique, ils préférent même à 30% l'école catholique. Alors posez vous de questions sur ce qui a fait fuir toute ces eleves en raison de leur confession réligieuses qui ne trouve pas leur place dans une école où sevissent des idéologues comme vous qui ne cessent de minimiser l'antisémitisme et de critiquer ceux qui les combattent. C'est vous qui selectionnez les éleves sur des fonction ethniques. Les victimes de racismes sont seulement celles qui vous arrangent.
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