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Journal d'école
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19 octobre 2016

La police dans les têtes

Non, il ne s’agit pas d’une farce, d’une mauvaise plaisanterie, d’une blague de potache : mardi matin, sur le coup des 10h 55, les 128 000 élèves des écoles, collèges et lycées publics et privés du Calvados ont brusquement interrompu leurs activités pour satisfaire aux exigences de cette nouvelle discipline scolaire, le confinement anti-terroriste. Les facétieux organisateurs ne sont autres que le préfet et le recteur d’académie, des gens réputés sensés, réfléchis, ce en quoi se trompait : ils sont d’abord aux ordres, prêts à se soumettre à n’importe quelle instruction, même la moins fondée, même la plus ridicule. Il est vrai que c’est là leur fonction. A ma connaissance, les enseignants et leurs organisations représentatives, de leur côté, n’y ont rien trouvé à redire, pas davantage que les parents. L’heure est à la paranoïa et, avant de partir en vacances, les 13 millions d’élèves et leurs familles auront donc assimilé l’idée, au plus profond d’eux-mêmes, que l’ennemi est parmi nous, d’autant plus dangereux qu’il est invisible et donc que la méfiance doit en toute chose être la règle. Dans l’opinion publique, les médias et la classe politique, certains ne réclament-t-ils pas l’enfermement des « suspects » ? Si, dans le Calvados, 128 000 élèves se retrouvent, comme ça sur le trottoir, à 10 h 55, c’est bien qu’il doit y avoir une raison… à moins de penser que nos gouvernants soient des charlatans et que la grande peur qu’ils contribuent à propager et à faire perdurer ne soit d’abord la marque de leur incompétence ou de leurs arrière-pensées.

Dans le Calvados, toujours, au même moment, le conseil municipal de Caen, également mû par le souci de garantir la sécurité de la population, votait un crédit de 100 000 euros supplémentaires pour la vidéosurveillance de la ville, venant s’ajouter au 1, 260 million d’euros déjà débloqués pour l’achat de 48 caméras.  Les élus (et les contribuables) auront encore beaucoup d’efforts à fournir pour atteindre le niveau de sécurité de la ville de Nice, dont les 1300 caméras de surveillance ont eu l’occasion, un soir de 14 juillet, de montrer toute leur efficacité.

Il faut dire qu’on ne lésine pas non plus sur les moyens, le budget sécurité présenté le même jour par le gouvernement s’élevant à plus de 13 milliards d’euros, sans compter les 33 milliards d’euros du budget militaire. Les besoins sont lourds, effectivement et la tâche exaltante : ces derniers jours, policiers et gendarmes ont été massivement mobilisés contre les migrants à Calais, contre des campements de gens du voyage ou encore pour protéger une corrida dans le Gard. Ils n’en peuvent plus, ces pauvres policiers : on comprend alors mieux le sentiment de révolte des 500 policiers, qui, l’autre nuit, ont manifesté sur les Champs-Elysées, au volant de leurs voitures de fonctions (donc au frais du contribuable) : c’était sans doute aussi pour eux, l’occasion de célébrer à leur manière l’anniversaire des massacres du 17 octobre 1961, quand leurs aînés noyaient les Arabes dans la Seine. Avec la bénédiction des autorités et de la plupart des médias.

Plus d’un demi-siècle plus tard, rien n’a vraiment changé : quand les pouvoirs publics se couchent devant la police, c’est la démocratie qui est piétinée.

Tout cela se passe en France, en 2016. Une façon comme une autre de se préparer à 2017…

 

Voir aussi sur Mediapart

 

 

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Commentaires
B
Je n'ai pas bien compris: confinement ou élèves sur le trottoir ?
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