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Journal d'école
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17 avril 2019

Dans une indifférence quasi-générale, le SNU poursuit sa mise en place.

C’est fait : les lycéen.nes connaissent leur futur uniforme de détenu. Ou uniforme de vigile, on ne sait trop, sinon que cette tenue est parfaitement adaptée au régime qui sera le leur avec le SNU (service national universel) : avec chaque matin, lever du drapeau et Marseillaise obligatoires, c’est une période d’enfermement militaire qui leur est imposée ; militaire et punitive, ce qu’Attal, le maître d’œuvre ce cette pantalonnade, qualifie d’ « engagement » de la jeunesse.

Pour poursuivre de manière aussi décomplexée la mise en place du SNU (service national universel), il faut vraiment que, sur ce sujet, le gouvernement se sente intouchable. De fait, alors que sa crédibilité est largement entamée, son projet de SNU, pourtant connu depuis plus d’un an, n’a jusque-là suscité que de très marginales et discrètes protestations, une indifférence qui accompagne d’ailleurs l’ensemble de la politique militaire (interventions militaires, commerce des armes, budget militaire) qui, quelle que soit la majorité du moment, n’a jamais de comptes à rendre ni sur sa finalité ni sur les extravagants moyens dont elle dispose.

Face à un dispositif ubuesque dans ses modalités et totalitaire dans son principe, la complaisance manifestée par l’opinion publique ne s’est quasiment jamais démentie, y compris chez les premiers concernés. Alors que la prochaine rentrée scolaire s’annonce comme lourdement touchée par les contraintes budgétaires, les milieux éducatifs ne semblent pas concernés par l’instauration du SNU :  comment, dans ce cas, prendre au sérieux les revendications syndicales sur le pouvoir d’achat des enseignants, les classes surchargées et ne pas faire le lien avec un dispositif qui, à terme, devrait ponctionner chaque année 3 milliards d’euros au budget de l’éducation ? Comment dénoncer l’autoritarisme de Blanquer et s’aveugler ou se satisfaire de l’encasernement programmé de tous les élèves de lycée, prévu en partie à l’intérieur des locaux scolaires avec la participation de personnels de l’Education nationale ? Quelques organisations syndicales ont pu, ponctuellement, ajouter la critique du SNU à leur argumentaire mais noyée dans un catalogue revendicatif si large qu’elle en perd toute spécificité, toute visibilité. Un silence finalement guère surprenant de la part d’une profession qui n’a jamais remis en question le principe de l’éducation à la défense dont le SNU est le prolongement naturel. Dans un pays qui a toujours considéré la conscription comme le complément naturel de l’éducation, cette bienveillance pour le SNU confirme que les enseignants (7 sur 10 approuvent le principe d’un service obligatoire pour les élèves) sont finalement des Français comme les autres…

Le gouvernement sait également n’avoir rien à craindre d’un mouvement associatif qui s’est déjà largement compromis soit par son mutisme, soit par un soutien ouvertement affiché, au SNU. Si la puissante Ligue de l’enseignement, dont l’histoire est liée à la militarisation de l’école ou la Fédération Léo Lagrange ont été les premières à prendre fait et cause pour le projet gouvernemental, les autres organisations continuent à faire preuve d’une grande pusillanimité. Cédant au chantage aux subventions d’une part, elles ne sont pas non plus indifférentes à la perspective offerte par le SNU de pouvoir user à volonté de l’inépuisable réservoir d’emplois dits « civiques » promis par le projet : avec une main d’œuvre taillable et corvéable à merci, quasi gratuite, les grands principes républicains d’engagement et de brassage social attestent que la république est tout à fait compatible avec des habitudes de requin.

Parmi les contestataires potentiels, les syndicats  étudiants se sont rapidement – et plutôt lâchement - retirés de la bataille après le choix du gouvernement de cibler la tranche d’âge des 15-16 ans, ne restaient plus au premier plan que les organisations lycéennes, lesquelles, après quelques velléités, ne semblent pas avoir fait du SNU leur priorité, tombant dans le piège tendu par les promoteurs du projet : de fait, en impliquant uniquement les plus jeunes des lycéens (ceux des classes de seconde, actuellement en collège), en ne faisant appel dans un premier temps qu’aux volontaires, en repoussant de plusieurs années la généralisation du SNU, on en arrive au paradoxe qu’aujourd’hui, personne, parmi les jeunes, ne se sent directement concerné par le sujet… Personne, à l’exception des collégiens et des écoliers, encore trop jeunes pour saisir toutes les implications d’un dispositif brutal et coercitif et qui les menace à terme.

Sinon, pour rester dans l’actualité du jour et puisque que le sauvetage de Notre-Dame paraît relever d’un formidable élan de solidarité ou (au choix) d’une insulte à la face des pauvres, voici quelques sources de financement possible : bien sûr, les 3 milliards d’euros prélevés chaque année sur les budgets éducatifs pour le financement du SNU ; ou encore les 37 milliards d’euros d’investissement prévus pour l’entretien de l’arme nucléaire ; mais également les 300 milliards d’euros engagés par la loi de programmation militaire.  Curieux que personne n’ait fait le rapprochement…

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