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Journal d'école
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7 juillet 2020

Cinq ans avec Blanquer ? L’Education nationale ne changera pas.

Comment, pour un ministre, rester en poste deux années de plus (sauf incident…) malgré un échec patent dans tous les domaines afférents à sa charge ? Tout simplement, en passant à la télé. Si la prolongation de Blanquer à l’Education nationale n’est pas à proprement parler une surprise, demeurait quand même le vague espoir que son bilan accablant et la méfiance générale des milieux éducatifs ainsi que d’une large partie des parents, inciteraient en haut lieu à siffler la fin de la partie. Mais en dépit de son incompétence avérée, Blanquer aura réussi l’exploit – le seul de ces trois années – de passer pour le plus visible des ministres, un sésame qui, dans une société de communication débridée – par un squattage indécent des salles de rédaction, des studios de radio, des plateaux télé (et les complicités qui vont avec) – ouvre toutes les portes.

Peu importe que les faiblesses du système éducatif français se soient aggravées et que les tares de l’Education nationale se renforcent sous son action : en réalité, depuis trois ans, la politique éducative de Blanquer tourne autour d’une communication effrénée s’adressant à une certaine partie de l’opinion publique, peu exigeante sur la complexité des débats éducatifs mais dont on attend des points dans les sondages et des suffrages aux élections (puisque Blanquer, dit-on, aurait des ambitions…)

Une communication à laquelle les nouvelles attributions (jeunesse, sport…) de l’homme de spectacle et ministre à ses moments perdus ne vont pas manquer de donner un surcroît de visibilité jusqu’au moment où peut-être – on peut toujours rêver – les yeux s’ouvriront et l’imposture apparaîtra au grand jour : en 2022, en dépit des gesticulations et des discours ronflants, l’école française aura pris cinq années de retard, cinq de plus.

En 2022, l’échec scolaire continuera de frapper ceux qui auraient le plus besoin d’école et l’école de fonctionner pour le profit d’un petit nombre. En 2022, la brutalité assumée du ministre aura eu surtout pour effet de renforcer la vieille tradition centralisatrice et autoritaire de l’Education nationale, prohibant le débat, la concertation, la prise en considération de la diversité des points de vue, repoussant toujours plus loin la perspective d’une école démocratique, d’une éducation démocratique. Loi sur l’école « de la confiance » (sic), réforme du bac, instructions renforcées pour le primaire, multiplication des évaluations normatives, obligation d’instruction pour les 3-6 ans, mise en place d’instances inféodées chargées de mettre en œuvre ou de faire appliquer les choix ministériels : de fait, les décisions emblématiques prises depuis trois ans, sans concertation, loin de « libérer » le système, auront incontestablement abouti à en accentuer la dimension bureaucratique et étatique, symbolisée, jusqu’à la caricature par la mise en œuvre, d’un impensable service national universel (SNU), reflet, d’une certaine façon, de vieilles habitudes de contraintes et de surveillance dont l’Education nationale semble décidément incapable de se défaire.

En dépit de l’autosatisfaction insolemment affichée et des annonces à répétition complaisamment relayées dans les médias, en dépit, de façon assez paradoxale, d’une certaine critique prétendument de gauche qui voudrait voir dans les mesures prises depuis trois ans l’amorce d’une sorte de révolution néo-libérale, voire de « privatisation de l’enseignement public », en réalité, la politique menée par Blanquer n’a rien de vraiment nouveau – elle sent même la naphtaline – sinon l’incommensurable insolence de son metteur en scène.

Cinq ans avec Blanquer ? Une hypothèse aujourd’hui parfaitement vraisemblable mais qui ne vient pas de nulle part…

« Rapportée au temps long ou moyen de l’histoire du système éducatif, la politique de Blanquer n’a sans doute rien de spécifiquement nouveau (encore moins d’historique, contrairement à l’image qu’il cherche lui-même à en donner…) : son autoritarisme (le contraire de l’autorité), son incapacité à écouter, son absence totale d’empathie et de respect, sa conception réductrice du service public confondue avec l'exigence d'obéissance de ses agents, ne tranchent pas fondamentalement avec les méthodes de ses prédécesseurs, s’inscrivant au contraire dans une tradition centralisatrice, abusivement étatique, qui remonte à loin et qui n’a été que rarement remise en question. » (1)

 

(1) Blanquer néolibéral ou plutôt national-autoritaire ? (15/01/2020)

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