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Journal d'école
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14 octobre 2021

Labo de la république : le service public d’éducation au service de Blanquer

Capture 14102021A grand renfort de publicité, Blanquer a donc lancé son club de réflexion (sic) officiellement censé « consolider la république, le pacte républicain autour des valeurs qui la fondent (…)» bla bla. Les premiers textes publiés sur le site du mouvement, comme les noms des sympathisants annoncés (Le Point, 12/10/2021) ne laissent guère de doute sur les valeurs en question : avec Jean-Pierre Chevènement, Manuel Valls, Aurore Bergé, Caroline Fourest, E. Badinter, Philippe Val, c’est la fine fleur de la pensée identitaire qui répond à l’appel exalté du ministre de l’EN, dans une nouvelle croisade contre les barbares qui « voudraient voir la république menacée ».  Le credo de ces nouveaux (mais plus très jeunes) croisés est connu : promotion d’une laïcité castratrice au service d’un régime politique sacralisé, au-dessus de toute critique. Avec un outil privilégié : l’école et son public de plus de 12 millions d’élèves, public d’autant plus captif que le même Blanquer vient de la rendre obligatoire.

C’est là où le bât blesse. Entre les objectifs affichés d’un think tank présenté comme non institutionnel et la politique conduite par un ministre qui n’a jamais eu aucun scrupule à faire passer ses convictions personnelles avant le débat démocratique, où passe la frontière ? La réponse n’a pas tardé, avec les premiers entretiens accordés par Blanquer à une presse toujours aussi complaisante mais aussi avec la page d’accueil du Labo de la république aux faux airs de Bulletin officiel de l’EN. Tout y est : définition d’une laïcité comme outil de contrôle, dénonciation d’un séparatisme fantasmé, citoyenneté renfermée dans une conception identitaire, quasi racialiste, refus des différences, considérées comme autant d’ennemis à abattre, refus du débat, de la confrontation d’idées, culte d’une république réduite à des exigences d’obéissance et de soumission à un ordre politique et social jamais interrogé.  De fait, le Labo de la république est la poursuite par d’autres moyens de la politique scolaire menée depuis quatre ans et demi par un politicien qui fait de l’école, avec brutalité, le labo de ses seules convictions et/ou de ses petits calculs carriéristes.

Dans ces conditions, et dans une période électorale qui autorise toutes les magouilles, une telle confusion des genres et des rôles pose un réel problème de légitimité, aggravé par le fonctionnement pyramidal et autoritaire de l’Education nationale : le service public d’éducation est-il censé se mettre au service des ambitions personnelles du ministre ? Question qui n’a sans doute jamais troublé l’arrogance et le sentiment de toute puissance d’un ministre, prompt à exiger des personnels, jusqu’à les poursuivre en justice, un « devoir d’exemplarité », dont il s’exempte lui-même sans vergogne. Le Labo de la république, c’est aussi cela : une insulte de plus à un service public instrumentalisé, détourné de sa finalité.

Et comme si l’arnaque n’était pas assez grosse, la date choisie pour lancer le mouvement en question ne tient pas du hasard : à un an de distance, la mort de Samuel Paty une nouvelle fois honteusement récupérée par les « détrousseurs de cadavres et imposteurs » (Dalton Trumbo), donne l’occasion à Blanquer d’occuper le devant de la scène pour distiller - plus que de la compassion pour la victime - son venin et ses phobies et pour avancer les pions de ses médiocres ambitions personnelles. Pour le Labo de la république, l’hommage à Samuel Paty, c’est tout à la fois un hommage à Blanquer et un acte d’allégeance, de conformité exigé de l’Ecole.

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