Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Journal d'école
Publicité
Archives
20 janvier 2008

"Concurrence" ou "libre-choix" des établissements scolaires ?

Si l’on a bien compris le rapport Attali, la suppression de la carte scolaire, l’institution d’un « chèque scolaire », la concurrence entre établissements seraient donc un moyen privilégié pour « libérer la croissance ». Mais, bien sûr, pas l’augmentation des salaires. N’étant pas moi-même spécialement compétent en économie – mais Attali ne l’est pas davantage sur les questions éducatives – je me garderai bien de parler croissance pour m’en tenir à la question de la carte scolaire. Et d’abord pour pointer une dérive sémantique lourde de sens : la confusion entre concurrence et libre-choix des établissements, deux termes indifféremment employés afin de brouiller le débat. Aujourd’hui, une concurrence existe bien entre écoles publiques et écoles privées. Dans certaines académies, notamment celles de l’Ouest, où une famille sur deux choisit à un moment ou à un autre l’enseignement privé, les établissements cherchent à donner d’eux-mêmes une certaine image : journées portes-ouvertes, publication des résultats du bac ou du DNB, utilisation parfois abusive de la presse locale pour mettre en valeur telle ou telle initiative éducative. Il s’agit d’attirer le client. Mais il faut comprendre que cette concurrence ne joue qu’à la marge, l’enseignement dit privé fonctionnant quasi exclusivement sous le régime du contrat d’association, ne se différencie en rien de l’enseignement public : mêmes programmes scolaires, mêmes horaires, mêmes méthodes, mêmes examens, enseignants recrutés sur les mêmes concours, surveillés – on ne va pas dire « conseillés » quand même ... – par les mêmes inspecteurs, l’enseignement privé catholique sous contrat est en réalité un clone de l’enseignement public et ceci malgré la proclamation par les responsables de l’Enseignement catholique d’un certain « caractère propre » qu’ils seraient bien en peine de définir. Ah si ! J’allais oublier un détail : à la sortie des établissements privés, on voit généralement des élèves à la peau plus claire que dans les établissements publics, mais ce serait faire preuve de mauvais esprit que de considérer cela comme un critère de choix pour les familles... De même, on voit encore des casquettes et des foulards sur les têtes dans les établissements catholiques mais là il n’est pas sûr que l’école publique ait fait le bon choix.

Bref, si la concurrence n’est pas chose nouvelle, on chercherait par contre en vain la trace d’un libre-choix. Le choix implique une diversité d’offres à laquelle le système éducatif français, monolithique, centralisé et autoritaire, au contraire de ce que l’on peut voir dans certains pays étrangers, s’est toujours refusé. Il y aura libre-choix le jour où les établissements pourront proposer des projets éducatifs et pédagogiques réellement différents, novateurs, libérés de la tutelle étouffante des programmes officiels, des BO et le l’inspection générale. On imagine bien sûr les risques potentiels, les parents, manipulés par le discours dominant, préférant peut-être le refuge illusoire des bonnes vieilles méthodes et l’on tremble par anticipation devant un lycée, un collège, une école dont les directeurs s’appelleraient Brighelli ou Le Bris. Mais le pire n’est pas sûr. L’Education nationale vient de confier à Gaby Cohn-Bendit la mise en œuvre de cinq collèges expérimentaux ; est-ce utopique d’imaginer que l’on pourrait en créer au moins un par département ? Pourquoi les écoles Freinet dont les résultats positifs sont unanimement reconnus, continuent-ils d’être regardés comme pestiférées par les instances officielles ? Qui aujourd’hui, parmi les familles, a la possibilité d’inscrire son enfant dans une école Montessori ? Le jour où, effectivement, la carte scolaire voudra bien s’ouvrir à ces pédagogies déjà anciennes, porteuses d’une longue expérience mais efficientes, ce jour-là, on pourra effectivement parler de libre-choix.

On peut douter que la commission Attali – au passage, on aimerait savoir qui elle a auditionné – ­ait travaillé dans cette direction. Certaines de ses propositions, par exemple sur l’évaluation des services publics – « faire évaluer tout agent d’un service public (professeur, fonctionnaire, médecin) par ses supérieurs [c’est déjà le cas mais manifestement, Attali ne le sait pas] mais aussi par les usagers » relève de la démagogie. Exiger que le socle commun soit repensé – alors qu’il n’est même pas encore entré en application dans les faits - afin d’y faire part « dès le primaire [à] un enseignement de l’économie [qui devra] expliquer et distinguer le rôle de la concurrence et des collectivités locales dans la crétion des richesses », laisse songeur sur le type d’éducation que la commission souhaite promouvoir. La confusion entre concurrence et liberté est trop grosse pour être honnête.

Publicité
Publicité
Commentaires
V
"les écoles Freinet dont les résultats positifs sont unanimement reconnus" (dixit Lubin): <br /> une seule évaluation (sur "l'ambiance") d'une seule école (Mons-en Baroeul) par les copains des "siences de l'éduc'" locales associées à l'IUFM (dans une UMR dont on se demande comment le CNRS et le reste de l'Université ont pu être exclus). C'est sans doute cela "l'unanimité" ?
Répondre
Publicité