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Journal d'école
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31 juillet 2019

Steve et les charognards

C’était attendu : à côté d’une émotion légitime, la découverte du corps de Steve a donné lieu à une bruyante et sordide récupération, guère en rapport avec l’événement mais qui offre à ceux qui s’y livrent l’inestimable avantage de régler des comptes et de se donner à peu de frais la noble figure de défenseur des droits. Du côté des gilets jaunes, notamment et de leurs habituels thuriféraires, la mort de Steve est un pur bonheur : pensez donc, depuis le temps qu’ils se présentent en opposants politiques victimes de violences policières, l’affaire vient à point nommé pour tenter de donner un second souffle à un mouvement qui ne vit que par le bruit et l’outrance. Quoi de plus efficace, dans ces conditions, que de faire enfiler un gilet jaune à un cadavre, même si ce dernier n'en a jamais porté de son vivant ? De la part d’un mouvement qui a fait de la violence son moyen d’action ordinaire (et quasiment sa seule finalité), la récupération de la mort de Steve n’est jamais qu’une escroquerie supplémentaire.

Ils sont tous là, la main sur le cœur : Melenchon, bien sûr, jamais en reste quand il s’agit de faire parler les morts mais qui aura du mal à faire oublier son indéfectible soutien aux forces de l’ordre, quelles que soient les circonstances. Notamment lorsque, à l’automne 2016, il se plaçait résolument du côté des policiers factieux qui descendaient dans la rue pour réclamer le droit de tirer sur tout ce qui bouge. Factieux… mais « républicains », se justifiait-il, qualificatif qui dédouane la république de toute responsabilité dans les crimes commis en son nom aussi vieux que la république. En octobre 61, les policiers qui noyaient les Arabes dans la Seine étaient également de braves «policiers républicains ».

Indignation, pareillement, du PS (et de Jack Lang…), qui a cautionné pendant cinq ans les pires dérives policières du quinquennat Hollande (et, avec Valls, l’un des pires ministres de l’Intérieur fournis par une république pourtant peu regardante en la matière).

Indignation d’EELV, dénonçant « l’acharnement du gouvernement » sur la jeunesse mais qui n’a rien trouvé à redire – à l’instar de toutes les autres formations politiques - au projet d’encasernement de la même jeunesse (le SNU), encasernement « républicain » sans doute.

La mort de Steve ? Une bénédiction donc, pour tout ce petit monde qui voit là l’occasion de se refaire une virginité dans un domaine où il s’est tant compromis. Mais aussi pour les médias qui trouvent dans la mort de Steve un sujet vendeur, bien utile en période estivale. Pour Mediapart, bien sûr, occasion rêvée de conforter ses certitudes et ses fantasmes (convergence des luttes, convergence des répressions) et de renforcer une ligne résolument populiste où le souci de l’information passe après la désignation d’un coupable. Il n’est pas sûr que la morale s’y retrouve.

Indignation confortable et quasi générale, mais surtout, par tout ce qu’elle laisse de côté, indignation sélective. Sur ce thème, je fais remonter, sans changer une virgule, une note de blog écrite il y a quelques mois 

« Les violences policières ne sont pas une chose nouvelle ; elles sont même, pourrait-on dire, une vieille tradition républicaine, étroitement liées à l’histoire d’un régime politique qui, pour diverses raisons, n’a jamais su gérer pacifiquement la contestation, une contestation qui, de son côté a très souvent développé un goût immodéré pour la violence verbale et physique. Pourtant, ces dernières semaines, le thème des violences policières fait l’objet d’une singulière attention, d’un intérêt, suspect, qu’on ne soupçonnait pas jusque-là et c’est cette nouveauté qui interpelle.

Suspect, car cette émotion quasi générale, feinte ou réelle et l’écho politique et médiatique qui l’accompagne (la droite sarkozyenne indignée…), on n’en trouve nulle trace dans le désintérêt, la passivité qui, de façon habituelle, entourent le sujet. Nulle trace également dans les enquêtes d’opinion montrant toutes un attachement massif de la population aux forces de l’ordre, traduisant un consentement tout autant massif aux méthodes et dispositifs habituels, aujourd’hui pointés du doigt…. »

 

Suite : Gilets jaunes et violences policières : une indignation sélective

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